Le Conseil d’Etat saisit la Cour de justice de l’Union européenne


Le Conseil d’Etat a annoncé, mercredi 6 mars, avoir saisi la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) dans l’épineux dossier du blocage des sites pornographiques ne contrôlant pas l’âge de leurs visiteurs.

Les représentants des sites Xvideos et XNXX avaient déposé devant le Conseil d’Etat des recours visant le décret d’application de la loi du 30 juillet 2020. Ce dernier permet à l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) de demander au juge le blocage des sites qui ne se conforment pas à la loi française. Depuis le changement législatif de 2020, les éditeurs de portails pornographiques doivent en effet s’assurer que les mineurs n’ont pas accès à leurs contenus et ne peuvent plus se contenter d’une simple déclaration sur l’honneur.

Une première demande de blocage a été formulée par le gendarme de l’audiovisuel devant le tribunal judiciaire de Paris en 2021, visant cinq sites pornographiques : Pornhub, Xvideos, Tukif, xhHamster et XNXX. La décision du tribunal est toujours suspendue à l’examen des recours visant le décret d’application, et la saisine de la CJUE vient y ajouter un nouveau délai important.

Plusieurs critiques écartées

Dans son communiqué, le Conseil d’Etat explique avoir écarté la plupart des critiques soulevées par les éditeurs de XNXX et Xvideos. Ces derniers estimaient que l’Etat devait définir les contours des moyens techniques à mettre en œuvre pour vérifier l’âge des internautes, source de crispation dans ce dossier. « La loi impose aux éditeurs de sites Internet d’adopter des mesures adaptées pour assurer la protection des mineurs, tout en leur laissant une marge de manœuvre quant au choix de ces mesures. Le décret n’avait pas à préciser davantage la nature de ces mesures », argue le Conseil d’Etat.

La haute juridiction administrative a saisi la CJUE sur un autre point épineux : le potentiel conflit entre les textes européens et la loi française. Est en cause le principe « du pays d’origine », qui empêcherait la France d’imposer certaines règles à des entreprises relevant du droit d’un autre pays de l’UE. Comme le note le site L’Informé, les requérants arguaient aussi que, tout au long des procédures législatives et de l’Arcom, des notifications auraient dû être adressées à la République tchèque, où sont sis les éditeurs de XNXX et Xvideos.

Près de quatre ans après le vote de la loi du 30 juillet 2020, aucune procédure de blocage visant un site pornographique n’a pour le moment pu aboutir. Une autre demande visant neuf sites (dont le leader, Pornhub), menée par les associations e-Enfance et La Voix de l’enfant, a récemment été renvoyée devant la cour d’appel de Paris par la Cour de cassation.

Toujours est-il que le gouvernement veut renforcer l’arsenal législatif : le projet de loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique (SREN), qui doit encore passer en commission mixte paritaire, veut contourner le juge en permettant à l’Arcom de demander le blocage administratif des sites pornographiques en infraction. Ce texte a aussi fait l’objet de vives critiques à Bruxelles, la Commission européenne craignant que certaines mesures n’entrent en conflit avec certains textes européens.

Le Monde

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